jeudi, novembre 15, 2007

Syrie : Bachar Al-Assad aurait échappé à une tentative de coup d’Etat en octobre


Le régime syrien tremble sur sa base et fait des concessions, sauf au Liban


Une source syrienne à Damas nous révèle que la tension est de plus en plus palpable en Syrie où le régime, très suspicieux, accuse une partie de l’armée de comploter pour renverser le président Bachar Al-Assad au profit de son oncle Rifaat Al-Assad. Depuis plusieurs mois, surtout depuis le coup d’Etat avorté à la mi-octobre, des milliers partisans de Rifaat, dont des officiers de l’armée, sont portés disparus.


Selon notre source à Damas, la dernière tentative de coup d’Etat a été programmée pour la fin du mois de Ramadan dernier (mi-octobre). Plusieurs officiers avaient prévu un putsch contre le président Assad. Ils avaient prévu de l’arrêter ou de l’assassiner pendant la prière de Aïd Al-Fitr à laquelle les officiels syriens participent traditionnellement à la mosquée des Omeyades à Damas. Mais, méfiant et se sentant menacé, le président Assad n’a pas respecté la tradition et, au lieu de se rendre à la mosquée de Damas, il a célébré la prière à la Mosquée Khaled Ibn Al-Walid à Homs. Au moins quatre officiers parmi les auteurs présumés du putsch, et des dizaines de soldats, ont été arrêtés et ils ont disparu depuis près d’un mois, affirme notre source.


La réaction de Damas : répression et concessions


Ces révélations viennent appuyer d’autres informations qui font état de la disparition de près de 6.000 personnes, ces derniers mois. Leurs proches qui se présentent auprès des autorités pour s’informer, demander des nouvelles des disparus ou protester contre leur arrestation sont à leur tour kidnappés et emprisonnés. Les victimes de cette répression appartiennent essentiellement à deux catégories de la société syrienne : les sunnites, à qui il est reproché de comploter avec le dissident Abdelhalim Khaddam, ancien vice-président, et les alaouites qui sont de plus en plus favorables au retour de Rifaat Al-Assad. D’ailleurs, plusieurs manifestations brandissant les portraits de Rifaat, organisées par ses partisans à travers le pays alaouite, y compris à Kardaha, la ville natale de la famille Assad et où est enterré l’ancien président Hafez Al-Assad, ont été violemment réprimées. Et des soulèvements d’officiers sunnites qui protestaient contre leur marginalisation au profit des alaouites ont été étouffés dans l’œuf, notamment à Homs.
La pression s’est récemment accentuée sur le régime syrien, notamment depuis la rupture de toutes ses relations avec l’Arabie saoudite et l’Egypte. Ces deux pays étaient depuis toujours les défenseurs de Damas sur la scène internationale et ses intermédiaires avec les Etats-Unis. Mais le renforcement de l’alliance syro-iranienne, et la politique syrienne au Liban ont accéléré la rupture entre Damas, Riyad et le Caire. Désormais, une guerre de communiqués par presse interposée à remplacé les relations diplomatiques traditionnelles. Les relations se sont nettement dégradées avec l’Arabie quand le Roi Abdallah a reçu Rifaat Al-Assad, en octobre dernier, signifiant son soutien à un renversement du régime de Damas ; et avec l’Egypte, quand Hosni Moubarak a reçu Saad Hariri, apportant le soutien du Caire à la majorité parlementaire libanaise. La presse syrienne a riposté en qualifiant Moubarak de « vieux dégénéré », et Hariri de « jeune adolescent en politique ».


Reste à souligner que cette pression commence à influencer la politique syrienne. Les Syriens ont organisé, ces derniers jours, une visite guidée sur la frontière avec l’Irak, destinée à montrer aux diplomates accrédités à Damas et aux journalistes étrangers que la Syrie a pris les mesures nécessaires pour sécuriser ses frontières avec l’Irak. Plus de 20.000 soldats y sont déployés et des postes fixes y ont été installés. Une mesure que les Etats-Unis avaient réclamée en 2003, en vain. Aussi, ces pressions ont poussé Damas à reporter - lire annuler - la conférence des « forces nationalistes et islamistes palestiniennes » qui devait s’y tenir avant la conférence de paix d’Annapolis. L’Iran tente de récupérer cette conférence et propose de l’héberger et de la financer. Certaines informations évoquent également un refroidissement, au moins de façade, des relations entre la Syrie et Khaled Mechaal, chef du bureau politique du Hamas, dont la présence à Damas encombre la Syrie. Il pourrait prochainement s’installer à Téhéran.


Les concessions syriennes prouvent que le régime de Damas commence à trembler. En quelques mois, un stock d’armes chimiques a explosé à Alep, une usine de remplissage de bonbonnes de gaz et une partie de la zone franche de Damas (26 juillet), un raids israélien contre une cible sensible en septembre, une tentative de coup d’Etat à la mi-octobre, un soulèvement d’officiers sunnites à Homs, et des manifestations hostiles dans son fief alaouite... Pour faire face à cette déstabilisation, et pour éviter son renversement et « acheter » son maintien, Bachar Al-Assad commence à faire des concessions sur tous les fronts, à l’exception du Liban. « C’est sa seule carte maîtresse et il compte bien la jouer » craint la majorité parlementaire libanaise. Il veut « monnayer la stabilité du pays du Cèdre contre le Tribunal international ». Pourtant, officiellement, Assad s’est engagé à respecter la « feuille de route » française pour réussir l’élection du futur président libanais. Mais en réalité, Damas compte sur ses alliés libanais, le Hezbollah et le général Aoun en tête, pour mettre en échec toute solution au Liban.


La menace iranienne


Le comble de l’hypocrisie est que le sauvetage du régime syrien pourrait se réaliser par Israël. L’Etat hébreu « tient » au régime des Assad, le seul capable de maintenir le calme sur le front du Golan, tout en harcelant Israël à Gaza et au Liban. C’est le message que vient d’envoyer Ehud Olmert et Ehud Barak, qui ont déclaré (14/11/2007) qu’« Israël doit examiner le prix de la restitution du Golan à la Syrie si cette dernière rompait son alliance avec l’Iran ». « Ce prix est à notre portée de main » ont-ils conclu. Or, dans ce cas, c’est Téhéran et les Gardiens de la Révolution qui commanditeront le renversement d’Assad après avoir infiltré tous les services syriens. L’Iran tient à son alliance avec la Syrie, condition indispensable pour assurer la pérennité du Hezbollah au Liban et de l’instauration de l’Empire perse et de l’axe chiite jusqu’à la Méditerranée. La destruction d’Israël, tant rêvée par les Mollahs iraniens, sera alors à portée de mains. L’ayatollah Khomeïny n’avait-il pas prédit que si chaque musulman déversait un sot d’eau sur Israël, le pays sera rasé ? Ses disciples Ali Khamenaï et Hassan Nasrallah comptent, eux, déverser au moins 20.000 missiles pour effacer Israël et modifier la région.


Khaled Asmar - Beyrouth